Les acides gras trans .. Le danger invisible
- Rajae HEFIDA - Ingénieure en industrie et sécurité
- 1 nov. 2016
- 4 min de lecture

Acide gras d’accord, mais trans c’est quoi?
Chimiquement parlant, les acides gras trans (AG trans) sont des acides gras insaturés qui présentent au moins une double liaison en configuration trans.
Quelles sont les origines de ces acides gras trans?
Les AG trans sont présents naturellement, en faible teneur, dans la viande, le lait et les produits laitiers suite à une transformation bactérienne des acides gras insaturés dans l’estomac des ruminants.
La cuisson à haute température des huiles végétales est aussi responsable de l’apparition des AG trans dans l’aliment.
Les AG trans sont également produits par l’hydrogénation partielle, un procédé industriel utilisé pour deux raisons : d’abord la transformation des huiles liquides en graisse solide, ensuite l’augmentation de la stabilité et donc de la durée de conservation de cette matière grasse.
L’hydrogénation industrielle consiste à l’ajout de l’hydrogène en présence d’un catalyseur pour transformer essentiellement les acides gras insaturés en acides gras saturés mais cette réaction génère aussi les acides gras trans qui constituent donc une impureté du processus d’hydrogénation.
Pourquoi les industriels font recours à l’hydrogénation ?
L’hydrogénation partielle des huiles végétales liquides est utilisée depuis les années 1990 pour remplacer le gras animal. Elle s’agit donc d’une alternative bon marché et qui permet d’obtenir des caractères fonctionnels (odeur, goût, conservation) plus attirantes pour les industriels.
Devant un coût moins cher, une durée de conservation plus longue, des frites croquantes, une crème fondante et une pâte moelleuse, devant touts ces avantages, la santé du consommateur devient une affaire secondaire pour les industriels.
Quels sont les effets des acides gras trans sur la santé ?
Des études d’intervention (Nurses Health Study (NHS), Health Professionals Follow up Sudy (HPFS), l’Alpha-tocopherol Beta-carotene Cancer Prevention Study (ATBC) et de la Zutphen Study) ont montré que la consommation des AG trans augmente significativement le risque des maladies cardiovasculaires (MCV). Elles montrent qu’un apport journalier d’AG trans supérieur à 2 % de l’apport énergétique total (AET) augmente significativement l’incidence des MCV. Ces études montrent aussi que les AG trans pourraient avoir un effet plus défavorable que l’acide palmitique en matière de risque cardiovasculaire.
Les études épidémiologiques, peu nombreuses et contradictoires, ne permettent pas de déterminer l’effet, bénéfique ou néfaste, de l’apport alimentaire des AG trans sur d’autres maladies (cancer, obésité …).
Est-ce qu’on consomme trop d’acides gras trans ?
D’après l’enquête de l’AFSSA, Les apports moyens en AG trans totaux de la population française sont estimés à 1,3 % de l’AET et donc en dessous du seuil de 2% qui est associé à une augmentation significative des risques de maladies cardio-vasculaires. Néanmoins, environ 5 % de la population française dépasse ce seuil de 10%.
La consommation des marocains en AG trans reste inconnue en absence des enquêtes statistiques dans ce sens.
Que dit la réglementation ?
En France, L’agence française de la sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) recommande de ne pas dépasser 2% en AG trans par rapport à l’AET.
Pour aider à diminuer les risques liés à la surconsommation d’AG trans, l’AFSSA a mit en place les teneurs limites en AG trans dans les aliments courants.
Pour la graisse cachée -destinées à l’industrie et aux artisans boulangers- présente dans les viennoiseries, pâtisseries, biscuits, barres chocolatées- la valeur limite en AG trans est fixée à 1g/100g de produit sous sa forme consommée, soit 0,4 % de l’AET. Le respect de cette limite, entrée en vigueur depuis 2007, ne doit pas s’accompagner d’une augmentation du taux d’AG saturé dans le produit.
Pour les graisses visibles (Les huiles de tables et les margarines) la valeur limite est fixée à 1% d’AG trans à respecter depuis 2006.
Ces seuils limites sont définis par l’AFSSA de telle façon à permettre d’abaisser les apports en AG trans chez les 5% de la population française dont la consommation dépasse 2%.
L’AFSSA a préconisé aussi depuis 2005 l’étiquetage des AG trans. La mention des AG trans n’est pas requise si le taux est inférieur à 0,1 g/100g pour les graisses cachées et 0,1 % pour les graisses visibles.
Aux Etats -Unis, la communication de la teneur en AG trans est obligatoire depuis 2006. En 2016, l’agence américaine en charge de la sécurité alimentaire et des produits de santé (FDA) a traduit son attention de retirer les huiles hydrogénées des produits industriels par la détermination d’une période de trois ans, à compter de juin 2016, pour que les industriels cherchent des alternatives technologiques des huiles hydrogénées dont l’utilisation sera interdite à partir de Juin 2018.
Au Maroc, il n’existe aucun seuil limite de consommation en AG trans ni aucune exigence par rapport aux seuils limites à ne pas dépasser par les industriels.
Dans ce sens, on trouve uniquement des arrêtés du ministre d’agriculture qui fixent les teneurs limites en AG trans auxquelles doivent répondre les huiles d’olives et les huiles de grignons ainsi que les produits dites « A FAIBLE TENEUR EN GRAISSES SATURÉES » et « SANS GRAISSES SATURÉES ».
Existe-t-il des alternatives à l'utilisation des acides gras trans ?
Actuellement, les alternatives des huiles hydrogénées sont encore très modestes et en phase d’étude.
L’interdiction des acides gras trans en New York a incité plusieurs restaurants à utiliser de l’huile à base de colza. En revanche, cette dernière est deux fois plus chère et présente un goût pas trop désirable.
D’autres alternatives sont proposées :
Développement de semences pour la production des huiles améliorées permettant une meilleure résistance à l’oxydation.
Utilisation de procédés alternatifs de modification des graisses.
Combinaison d’ingrédients de substitution, tels que certaines fibres, celluloses, amidons, mélanges protéiques, etc
Références
- Rapport de l’AFSSA (2005) sur les risques et bénéfices pour la santé des acides gras trans apportés par les aliments : Recommandations.
- U.S Food and Drug Administration
- Arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et de la pêche maritime et du ministre de la santé n°281-16 du 21 rabii II 1437 (1er février 2016) fixant les prescriptions et modalités d’indication des informations nutritionnelles dans l’étiquetage des produits alimentaires préemballés.
- Arrêté conjoint du ministre de l’agriculture et de la pêche maritime et du ministre de l’industrie, du commerce, de l’investissement et de l’économie numérique n°293-16 du 22 rabii II 1437 (2 février 2016) fixant les caractéristiques physico-chimiques et/ou organoleptiques auxquelles doivent répondre les huiles d’olives et les huiles de grignons d’olive commercialisées.
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